1942

11 - Compte rendu de la conférence du 1er juillet. Tract manuscrit et ronéotypé sur du papier quadrillé d’écolier, deux pages, Anonyme, sans date [début juillet 1942], ms. et ronéo. (A. D. Indre, M 2745-3)
Il s’agit du compte rendu critique d’une conférence faite le 1er juillet 1942 à La Châtre par le délégué départemental à la propagande sociale du Maréchal, nommé en novembre 1941. La même conférence semble avoir été proposée en divers lieux (ainsi à Argenton-sur-Creuse le 29 juin précédent) ; intitulée « La France poignardée », elle présentait successivement : la « situation actuelle de la France » ; « le Communisme » ; « la Révolution Nationale » ; « nos fautes » ; « le rôle futur de la France » ; une conclusion enfin affirmant que ce rôle futur sera joué grâce à la politique du Maréchal et que « la France sera comme nous la désirons grâce aux légionnaires et aux jeunes » ; elle était accompagnée de la projection de deux films, Vous avez la mémoire courte et Un an de Révolution Nationale, ainsi que du reportage enregistré lors de la venue du Maréchal Pétain à Châteauroux le 28 mai 1942. Dans ce compte rendu, il est question de l’affaire de Syrie, occupée par les Forces Françaises Libres et les Britanniques après l’armistice de Saint-Jean-d’Acre (14 juillet 1941) : le délégué à la propagande a apparemment fait partie des 32 000 soldats de l’armée de Vichy qui préférèrent être rapatriés en France après cet armistice plutôt que de rejoindre (comme 6 000 autres) les F.F.L. Il est aussi question de Madagascar, occupée par les Britanniques en mai 1942. Ainsi est vivement critiquée la politique de Vichy qui partout résiste militairement aux Britanniques et aux F.F.L. Le compte rendu se termine au verso par l'évocation d'un appel violemment attaqué dans le tract suivant (voir n° 12).

Compte rendu de la conférence du 1er juillet

Tout d’abord Mr C. s’est étonné que dans un tract distribué en ville il s’était fait traiter d’orateur nazi, car dit-il “mon coeur est bien trop français” ! Le 13 mai il avait déclaré : “j’étais en Syrie en août 41, lorsqu’on m’annonça qu’en cas d’attaque allemande ou italienne je serais mobilisé dans les forces gaullistes, comment, moi, fidèle au maréchal servir de Gaulle ? Je demandais à partir en France”. Mr C. est non seulement un nazi par les paroles, mais un froussard par les actes. Non n’est-ce
pas ! se battre pour la patrie, il laisse ce soin à d’autres, lui, son rôle, c’est de gagner des rons, de bien se nourrir, et de bourrer le crâne aux gens ! (ou du moins essayer). Il en est tout heureux et il étale sa joie d’être là et de crier aux pauvres soldats de Madagascar “Allez y jeunes gens, mourrez pour la France !” pour que C. puisse parler de “l’épopée de la France éternelle” avec des mots qui l’enverront un peu plus vite au tombeau (si on les laisse faire !) mais qui rapporteront du fric. Parlant du bolchevisme il déclare : “En Russie, la condition de vie est plus mauvaise qu’elle l’était au temps des tzars”. Pourquoi donc, les Russes se battent-ils avec un acharnement que les boches eux mêmes reconnaissent ? Pourquoi donc, dans les régions occupées les Russes se battent-ils farouchement ? et les guérillas russes se comptent par centaines de milles. Pourquoi donc, les hommes de 40 et même 50 ans sont les plus enthousiastes au combat ? Ils ont connu le régime tzariste ceux-là, ils peuvent comparer ! Nous ne sommes ni communistes ni anglophiles, mais nous ne voulons pas qu’on nous raconte d’histoires ! Deux films suivent. Rien à dire le truquage est admirable. Oui, nous sommes d’accord, en Espagne, en Russie il y a eu des atrocités de commises ! Mais elles sont le fait, comme dans toutes les révolutions de quelques exaltés ! et elles ont lieu dans les deux camps. Un exemple, les Arabes de Franco ont pillé au moins autant d’églises que les extrémistes espagnols. Et Franco n’a t-il pas fait fusiller de ses bien aimés compatriotes ? Il en fusille encore. On entend le discours prononcé à Châteauroux par le Maréchal et la phrase fameuse “je vous parlerais bien de l’armée, mais il paraît que ça fait peur à nos voisins d’en face”. Ce ne sont hélas que des mots, car le Maréchal a les bras liés. Il ne faut pas se payer de mots et tenir compte des réalités ! C’est Laval qui est le maître et il ne nous a pas caché qu’il voulait aider l’Allemagne. Le Maréchal ne peut rien contre Laval.
En fin de séance, un ordre du jour est “voté” dans lequel les habitants de la Châtre fustigent “ceux qui tentent de diviser la France”. Et bien nous aussi on les fustige ceux-là ! Parce que ceux qui tentent de diviser la France, ce sont les nazis !
L’immense majorité du peuple français est pour de Gaulle. C’est pour cela que nous lutterons contre la minorité de collaborateurs et d’imbéciles qui prétendent être la France.

Sus à la dissidence Vichéenne

Un seul chef De Gaulle
Un seul moyen la victoire
Un seul but la France.