1942

17 - « Sous le régime Vichyssois le mercanti est roi ». Tract manuscrit à l'encre bleu, Anonyme, octobre 1942, ms. (A. D. Indre, M 2745-2)
Deux affiches de ce type, écrites à la main en lettres majuscules, ont été apposées sur les murs de la ville de Chabris dans la nuit du 16 au 17 octobre 1942 ; elles ont été collées l’une rue du Pont sur la porte d’une maison, « l’autre rue de la poste sur un panneau d’affichage et recouvrant en partie l’affiche de propagande pour la relève des prisonniers » ; « dès huit heures la brigade prévenue de la découverte de ces affiches les a fait enlever. L’une a pu être décollée, l’autre plus solidement placardée a été déchirée. L’enquête n’a pas encore permis de découvrir l’auteur de la rédaction ou de l’apposition de ces affiches. L’effet produit sur la population est nul ; personne ou presque à part celui qui a prévenu la gendarmerie n’a eu le temps de lire ce texte placardé » (Rapport du capitaine commandant la section de gendarmerie de Châteauroux « sur deux affiches antinationales à Chabris », Châteauroux, 20 octobre 1942).
Cette affiche, peut-être d’origine communiste, dénonce le triste sort fait à l’ouvrier par le régime de Vichy ainsi que les profiteurs de la pénurie alimentaire qui sont accusés d’être en outre des collaborateurs ; elle célèbre le combat de la Russie et invite à lutter par tous les moyens contre la Relève.

SOUS LE RÉGIME VICHYSSOIS LE MERCANTI EST ROI

Le lait à 3F70, le vin à 10 F, les pommes de terre à 4 et 5 F le kg, les haricots à 30 F et le reste à l’avenant, une seule chose reste immuable, le salaire de l’ouvrier. Comme il en a toujours été. Le favoritisme pour une classe au détriment d’une autre ; pour le cultivateur, prime au battage, prime sur les veaux et porcs etc. etc. et liberté absolue de vendre au dessus de la taxe. Mais pour l’ouvrier défense de réclamer une augmentation de salaire ou alors gendarmes et policiers se chargent de mater ces crèves-la-faim qui osent réclamer droit à la vie.
Jeune ouvrière on te demande de faire des enfants, réfléchis que tu ne pourrais enfanter que de pauvres enfants rachitiques ; déjà sous alimentée toi-même, ne pouvant avec ton maigre salaire subvenir à tes besoins journaliers les plus pressants. Heureux sont les profiteurs de la misère, ceux qui en échange d’une chemise, d’une paire de bas, d’une casserole, ou même d’un vase de nuit, peuvent obtenir une part supplémentaire de beurre, de viande et même de pain, oui heureux ces commerçants sans scrupule et sans coeur qui après avoir vendu leur stock de rossignols et réalisé des fortunes colossales sur le dos des malheureux, n’ont vu jusqu’à maintenant aucun indice de rationnement sur leur table.
Pour eux, la guerre est une affaire, une bonne affaire et ne demandent qu’une chose, que cette guerre dure longtemps, aussi la plupart sont collaborateurs et souhaitent ardemment la victoire allemande, et partisans de la relève avec l’appui du gouvernement ils font leur possible pour nous affamer et nous réduire à l’impuissance afin que nous acceptions le départ en Bochie, où malheureusement déjà quelques égarés sont partis.
REFLECHISSEZ, ouvriers, employés, à ce que l’on veut vous faire accomplir en Allemagne, une grande nation, la Russie, combat seule pour votre liberté, pour votre bien-être, pour votre vie et sachez qu’en Allemagne vous fabriquerez des armes qui serviront à abattre vos frères russes, c’est donc indirectement contre vous que vous aurez aidé à armer les Fritz.
Sachons souffrir, mais refusons par tous les moyens de participer à la relève.

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