1943

31 - « La Riposte des Patriotes de l’Indre. Organe du Comité Départemental de la France Combattante », sans date [novembre 1943], dactyl. et ronéo. (A. D. Indre, 2 Z 2669)
« Dans la nuit du 4 au 5 décembre 1943, des tracts à tendance antigouvernementale ont été apposés dans les Communes de Roussines et Mouhet (Indre). Ils ont pour titre : “La Riposte des Patriotes du Berry (sic)” et sont signés “Le Bureau de l’U. L.”. Ces tracts ronéotypés mesurent 20 x 30 cm. Ils ont été collés sur le panneau d’affichage de la Cne [commune] de Mouhet et sur des poteaux électriques dans la Commune de Roussines. Quatre tracts ont été recueillis par les militaires de la brigade de Gendarmerie de Saint-Benoît-du-Sault. Aucun renseignement n’a pu être recueilli jusqu’à ce jour sur les auteurs de cet affichage qui n’a produit aucune réaction sur la population. »
(rapport du lieutenant commandant la section de gendarmerie du Blanc « sur un affichage de tracts antigouvernementaux », Le Blanc, 7 décembre 1943).
Le Comité Départemental de la France Combattante s’était constitué spontanément dans l’Indre à Châteauroux dans l’automne 1942 avec pour but de coordonner l’action des divers mouvements de Résistance du département qui étaient représentés en son sein ; chaque mouvement conservait cependant son indépendance pour demeurer aussi cloisonné que possible. Il tint plusieurs réunions à Châteauroux et comptait notamment parmi ses membres Robert Monestier ; ce Comité est à l’origine du Comité Départemental de Libération.
Le principal rédacteur de La Riposte, dont une dizaine de numéros furent réalisés, était Georges Vignals, qui devint après la Libération vice-président du C.D.L. de l’Indre et directeur politique du journal La Marseillaise ; La Riposte était dactylographiée puis ronéotypée à la ferme de Georges Pirot aux Jodons à Jeu-les-Bois.
Deux autres numéros de cette publication sont proposées en Appendice (« b » et « c »).

N. B. Le document est déchiré dans la partie droite ; les passages détruits ont été restitués avec vraisemblance entre crochets […], à l’exception de la fin du texte, dont le sens général ne laisse cependant aucun doute (instaurer un régime démocratique et républicain probablement).


S’UNIR
LUTTER
VAINCRE

LA RIPOSTE
des PATRIOTES DE L’INDRE
Organe du Comité Départemental de la “FRANCE COMBATTANTE”


En ce mois de novembre 1943, les Français se réjouissent de voir que la situation militaire de l’Allemagne s’empire de jour en jour pour la projeter comme le disait Staline dans son discours du 6 novembre commémorant le 26e anniversaire de la Révolution russe au bord de l’abîme. Sur tous les fronts nous constatons avec satisfaction le recul de la bête nazie sans qu’elle puisse sur aucun point reprendre la moindre initiative. Les succès de l’Armée Rouge ne se comptent plus et le dernier en date porte au sommet de la gloire ces valeureux soldats qui ont été trempés par 26 ans de régime bolchevik. La prise de Kiew capitale de l’Ukraine représente pour nos ennemis un terrible coup tant au point de vue stratégique que moral. La perte de cette province, après le bassin minier du Donetz et le franchissement du Dniepr, portera à son comble le désarroi des nazis qui pourront se souvenir que le voyage aller et retour Kiew-Stalingrad coûte cher, terriblement cher. Le 8 novembre 1942, Hitler, dans son discours commémorant le putsch nazi 1923, disait que personne ne les chasserait des territoires conquis. Que va-t-il bien pouvoir nous raconter cette année à même époque et M. Gœbbels lorqu’il prétendait que la possession de l’Ukraine les mettrait à l’abri de toute famine, on songe malgré soi que la perte de ce grenier pourra bien ramener un nouveau 1918 quoiqu’en pense Gœbbels. Les pertes éprouvées par l’armée allemande comme le démontre les statistiques de 4 mois d’offensive russe sont irréparables. A côté des 2 millions 700 mille hommes tués, blessés et prisonniers, un matériel énorme a été détruit et comment l’Allemagne pourrait-elle songer à remplacer ce matériel alors que ses usines sont pulvérisées les unes après les autres. En effet, l’offensive aérienne anglo-américaine anéantit toutes les villes industrielles allemandes, jetant le désespoir parmi les populations civiles et on pense bien qu’avec une telle situation le moral allemand subit un rude choc.
En Italie, où les Alliés avancent lentement certes, mais régulièrement, les Allemands se voient contraints à la retraite, comme ailleurs malgré le repêchage de Mussolini. [La] [fa-]meuse guerre sous-marine de [l’amiral] Dœnitz ne connaît pas pl[us de succès] que les autres fronts.
Les patriotes yougoslaves infligent des pertes consi[dérables] à l’ennemi, ainsi que les p[artisans] de tous les pays occupés q[ui ne] [mé-]nagent aucun effort pour ai[der les] Alliés à broyer la bête nazie. L’Allemagne n’a pas plus de [succès] au point de vue diplomatique [; elle a] perdu l’initiative et elle [recule] comme sur le front mili[taire].
La Conférence de Moscou [manif]este encore l’union des puissances alliées et offre de grands espoirs à tous les peuples épris de liberté pour l’après-guerre. Elle met fin aux dernières chances des nazis de voir une fissure entre les nations unies et ils sentent que les décisions militaires et politiques qui ont été prises sont lourdes de menaces (second front, punitions des criminels de guerre. Liberté des peuples pour choisir le gouvernement de leur choix).
Sur ce dernier point, nous saluons avec joie la première réunion de l’assemblée consutative à Alger où étaient réunis, à côté des généraux De Gaulle et Giraud et de membres de la Chambre des Députés siégeant au parlement de 1936, les délégués de la Résistance en France qui auront expliqué au Comité d’Alger les souffrances, les déceptions et les espoirs du peuple de France torturé, affamé depuis juin 1940 par un occupant qui ne lui ménage pas les sévices. Il voit dans le Comité en cette Assemblée la résurrection des institutions démocratiques françaises et l’espoir que la leçon de la Corse se répétera en France. Les patriotes corses nous offrent un magnifique exemple. Ils ont libéré leur pays de l’envahisseur et ont châtié comme il convenait les traîtres et les collaborateurs ; et maintenant ils administrent leur pays suivant les principes démocratiques. Ils ont eux-même accompli cette tâche et, comme le faisait remarquer très judicieusement Mr André Philippe : “Les Français ne sont pas des êtres inertes attendant passivement leur délivrance de l’extérieur. Ils peuvent à l’instar de leurs camarades corses et avec l’appui de leur armée formée, instruite dans les territoires français d’outre-mer, chasser le Boche de France, renverser [Vichy] et ins-[taurer…]